À plus de 65 ans, l’homme à la blouse blanche joue les prolongations après avoir assuré la formation d’une relève experte. Cet homme est l’illustre Professeur amiénois, Bernard Devauchelle. C’est lui qui a imaginé l’Institut Faire Faces, après la première greffe du visage au monde réalisée il y a plus de quinze ans avec le Professeur Sylvie Testelin. « Le père doit se laisser tuer avec résistance, respecter l’indépendance d’esprit et ne pas laisser une marque indélébile », confie-t-il.
Au-delà des centaines de visages et vies réparées, Bernard Devauchelle offre aussi au monde de la chirurgie l’Institut Faire Faces, le premier Centre d’Etudes et de Recherche dévolu à la défiguration, son dernier rêve devenu réalité. D’une surface de 3400 m2, l’Institut Faire Faces a été livré en mai 2022 après deux ans de travaux.
La caractéristique principale du centre de recherche est de recevoir sur un même lieu des activités très diverses qui doivent pouvoir se dérouler sans se déranger les unes aux autres. « L’organisation de l’Institut se structure donc en trois strates. Une première qui s’encastre dans le terrain en pente, dédiée à la formation, dans laquelle on retrouve, entre autres, une halle opératoire. Un étage transparent, ouvert sur la nature environnante et sur le paysage, lieu d’échanges informels, de présentations et d’expositions. Un étage supérieur plus isolé, destiné au laboratoire Chimère et aux bureaux avec notamment une bibliothèque. Le plateau de chirurgie expérimentale est aménagé au rez-de-chaussée, » décrit Laurent-Marc Fischer, l’architecte de chez Architecturestudio qui signe d’autres grandes réalisations telles que le Parlement Européen, le centre de recherche de Danone, la restructuration du Campus de Jussieu, le grand auditorium de la Maison de la Radio ou le théâtre national de Bahreïn.




Un projet pionnier
Un grand bloc opératoire permet donc d’aménager les six tables d’opération autour d’une table maître. La salle est éclairée naturellement par de grandes fenêtres implantées de façon à éviter tout effet de contre-jour inconfortable. La salle de bilan pédagogique est en liaison directe avec la salle d’opération. « La vocation de cet Institut est de réunir des chercheurs issus de cultures différentes autour d’un même objet de recherche afin de croiser les regards. Ils sont biologistes, chirurgiens, mathématiciens, biochimistes, universitaires, ingénieurs de l’UTC…, » liste le Professeur Stéphanie Dakpé, elle-même formée par les Professeurs Testelin et Devauchelle, qui, avec cet Institut, garantissent l’accès à un équipement de pointe.
Sans oublier une augmentation de la capacité de réponse des chercheurs aux appels à projets nationaux et européens. Les domaines de recherche vont bien au-delà de la tête et du cou avec de larges champs d’application : de la cosmétique à la cancérologie en passant par l’orthopédie et développement de dispositifs médicaux. Le très grand potentiel scientifique et économique de ce lieu des ressources humaines, technologiques et matérielles nécessaires vient renforcer sa triple vocation de recherche multidisciplinaire, de formation au geste chirurgical et de sensibilisation du grand public au handicap facial.
Avec un fort ancrage européen, l’Institut est ainsi un projet pionnier, qui fait converger chercheurs, médecins, chirurgiens, associations de patients et industriels afin d’améliorer la prise en charge des malades.



Une dimension humaniste et inclusive
« Nous sommes praticiens, chercheurs mais aussi enseignants. Nous sommes équipés pour former les chirurgiens et étudiants aux techniques chirurgicales de reconstruction de pointe et développer un réseau collaboratif multidisciplinaire pour l’excellence chirurgicale, » insiste le professeur Devauchelle, pour qui la formation ainsi que la diffusion des connaissances et des savoir-faire est une mission essentielle de l’Institut, qui dispose en son nouveau bâtiment d’un amphithéâtre de 135 places. « Enfin, les espaces d’exposition et de convivialité du bâtiment, accessibles à tous, permettront également d’informer le grand public à travers des visites, des conférences et des débats, conclut le Professeur Testelin. La dimension humaniste est au cœur du projet de l’Institut, qui ambitionne de changer le regard que la société porte sur les personnes porteuses d’une différence faciale, en organisant des campagnes et évènements en faveur d’une plus grande inclusivité. »

