Penser la maison comme un être vivant

Emmanuel Henneron pourrait parler des heures de sa maison passive qui affiche des performances thermiques à faire pâlir d’envie n’importe qui en ces temps de sobriété énergétique. Surtout qu’elle communie avec le soleil pour mieux se révéler.
Par Nadia Daki
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Confort et bien-être sont les mots qui rythment la visite de la maison passive d’Emmanuel Henneron, étonnante bâtisse nichée à Ailly-sur-Noye à quelques kilomètres d’Amiens. Le volume de la pièce principale, composée du salon et de la salle à manger-cuisine, est saisissant. Les sept mètres de plafond, avec poutres apparentes, ne laissent aucune place aux courants d’air. Et pour cause, tout a été pensé en amont de manière à ce que ces derniers rendent leur dernier souffle le plus rapidement possible. « C’est à cause ou grâce à cette maison que je me suis mis à mon compte, raconte son propriétaire qui l’a fait naître il y a trois ans et demi. J’étais déjà convaincu qu’on pouvait construire autrement. J’ai quitté mon travail de commercial-apporteur d’affaires pour concrétiser ce projet. » 

Place au soleil 

Fin connaisseur des techniques de construction et des matériaux, il réfléchit à la meilleure conception pour optimiser le confort thermique. « Une maison est comme un être humain, compare-t-il. Lorsqu’on a froid, on ajoute un pull. C’est pareil pour une maison. L’isolation, pour être la plus performante possible, doit être effectuée par l’extérieur. » En ce mois d’octobre, les rayons qui percent les quelques nuages présents traversent les différentes baies vitrées. Située plein sud, la maison bénéficie d’un ensoleillement généreux lorsque la météo est au rendez-vous. « En plein été, on est à 23-24 °C. Alors que dans une maison classique, on atteindrait très facilement les 30-35 °C », assure-t-il. Le plus frappant, c’est qu’aucune de ces baies vitrées ne contient de volet. Le secret à cette climatisation sans artifice ? « L’utilisation de murs lourds et épais, confie Emmanuel Henneron. Ces murs, de 16 cm d’épaisseur, sont des sortes de lego en polystyrène dans lesquels on vient couler du béton. Certes, le béton n’est pas le matériau le plus noble mais c’est le plus lourd actuellement sur le marché. Il permet de réaliser des murs pouvant aller jusqu’à 50 cm d’épaisseur. En réalité, on utilise des techniques ancestrales puisqu’on est dans le même cas de figure que les châteaux ou les églises mais avec des matériaux plus récents et plus performants. » 

Ambiance cocooning 

Ces murs constituent une enveloppe de protection et créent une sorte de cocon. A l’intérieur, on a juste envie de se lover dans le canapé et d’apprécier la décoration d’inspiration personnelle. Emmanuel et Julie, son épouse, fonctionnent au feeling. Les troncs de bouleau trouvent la latitude nécessaire pour s’étendre sur le long mur qui court jusqu’au toit. Les charpentes apparentes ajoutent au cachet. S’il ne fallait pointer qu’une seule pièce maîtresse, ce serait les portes d’armoire fixées au mur qui captivent le regard. « Elles ont entre 400 et 500 ans, renseigne le maître des lieux. Elles appartenaient à ma maman qui les avaient découvertes dans le magasin qu’elle tenait à Lille. » Les escaliers jouissent également d’une touche personnelle. « J’ai dessiné et conçu chaque marche. Elles sont en chêne. » 

Partage d’expériences 

Passionné par cette expérience et convaincu de son intérêt, il décide à 43 ans, de prêcher en quelque sorte la bonne parole. « On ne peut plus construire comme avant. Par les temps qui courent, ce n’est même plus possible. Mais il y a encore beaucoup de préjugés qui dominent », constate-t-il. C’est pourquoi avec son entreprise de construction de maison passive, CEA construction, il dispense également des formations. « Quand on regarde les solutions proposées en termes d’isolation, j’ai parfois l’impression qu’on opte pour le pansement sur la jambe de bois, regrette-t-il. Il y a une réelle nécessité à faire évoluer les mentalités. » Et pour ce faire, il peut s’appuyer sur du concret, sa maison. « Pour une surface de 330 m2, le chauffage représente 250 euros par an. S’il y a du soleil en journée, on n’a pas besoin de chauffer en hiver. Et lorsque nous sommes absents une dizaine de jours, on n’a plus cette angoisse de rentrer dans une maison froide. Même en hiver, elle ne descendra pas en dessous de 17-18°C. » Le triple vitrage contribue aussi à une meilleure étanchéité. 

Passage de flambeau 

Son savoir-faire a déjà séduit des clients, particuliers et professionnels. « On propose des constructions clé en main, qu’il s’agisse de maisons individuelles, de locaux commerciaux ou d’habitats collectifs. Cette année, nous avons sept chantiers et la demande explose sans doute à cause du contexte énergétique actuel », indique Emmanuel Henneron. Pour les plus curieux ou les plus sceptiques, il est désormais possible de passer une nuit dans sa maison car elle devenue à la fois maison-témoin et gîte. Et comment sera leur nouvelle maison ? Passive bien évidemment. 

Texte : Nadia Daki
Photos : Laurent Desbois – Lwood
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