Parse, c’est son « blaze ». Du nom d’une erreur de syntaxe informatique qui rend fou car elle oblige à relire tout le code pour la débusquer… Parce qu’avant d’être graffeur, Bertrand Parse (de son vrai nom Delaporte), 32 ans, était informaticien. Mais ça, c’était avant. « Il y a dix ans, une marque de bombes de peinture m’a appelé pour me proposer de commercialiser ses produits en France : ils m’ont donné trois jours pour réfléchir. »
D’abord un commerce…
Bertrand Parse se lance et ouvre un commerce dédié au graff à Lens. « Cela m’a offert de belles opportunités. Celle de rencontrer beaucoup d’autres adeptes de cet art, mais aussi l’opportunité de me rendre en Australie rencontrer des graffeurs que j’admire. » L’un des credo de Bertrand Parse, c’est de militer pour faire reconnaître le graff comme un art à part entière dans l’ex-bassin minier.
Puis une association
C’est lui qui est à l’origine, avec quelques amis, de la création de l’association Red Bricks, baptisée ainsi « parce qu’on peignait des briques rouges. » La structure est aujourd’hui spécialisée dans l’organisation d’événements et d’ateliers, notamment au sein des collèges et des lycées. Les prestations sont, depuis janvier dernier, rétribuées via les statuts d’artistes des graffeurs.
150 portraits
Aujourd’hui, le carnet de commandes de Parse est quant à lui archi-rempli : l’un de ses prochains grands chantiers sera de jouer de la bombe pour dresser 150 portraits d’habitants sur 1600 m2, afin de décorer les murs anti-bruits situés le long de la deux fois deux voies reliant Lens à Arras. « J’ai déjà travaillé sur des maquettes. Les personnes vont être immortalisées dans des situations de la vie quotidienne : en lisant le journal, en jouant au ballon, en éclatant de rire… » L’association Red Bricks est aujourd’hui reconnue, notamment dans les quartiers dits ‘sensibles’. « Nous offrons chaque année une vingtaine de fresques pour faire connaître notre art et inviter les graffeurs à se rassembler et à se mobiliser : le graff, c’est aussi la générosité. »
Parse ou l’art du partage
Ils sont six retraités venus du Poitou pour visiter le Louvre-Lens. Sur leur chemin, ils croisent la route de Parse, devant les graffitis de l’avenue Alfred Maes. Parse, le sourire aux lèvres, engage la discussion avec eux. Il leur explique son art, et eux, venus ici pour admirer des œuvres, sont ravis de cette découverte inattendue. Quelques minutes de partage qui confirme que le graffiti sur les briques rouges est un art pour tous.
Le Lens Style Buster
Ils se nomment Sami, Rödahund, Andrew Wallas, Berthet One, Komesennin, Katun, Hoter ou le légendaire Nasty. Ils sont venus du Japon, d’Italie, de Malaisie ou de Suède pour participer au Lens Style Buster. Depuis sept ans, la manifestation a attiré quelque 200 artistes internationaux à Lens. Parse est soutenu dans sa démarche par la ville ainsi que par Naceira Vincent qui depuis cinq ans est à ses côtés : « Bertrand me soumet une liste d’artistes, nous essayons de trouver la meilleure formule pour offrir aux visiteurs un éventail de l’art du graffiti. Grâce à lui, la ville rayonne à l’international. Du coup, des artistes renommés passent incognito par Lens et vous avez un nouveau graffiti qui apparaît. »
Prêcher le graffiti
Pour faire bouger le graff à Lens, Bertrand Parse avait été le premier à demander des murs d’expression à la mairie. « Cela m’a pris dix ans de réunions, mais j’y suis arrivé », sourit-il. Ses armes, ce sont à la fois le discours et la pédagogie. « A chaque fois que je tombe sur une belle fresque, je prends des photos : cela permet de montrer aux élus que les graffitis peuvent être très esthétiques. » Particulièrement loquace, le trentenaire ne rate jamais une occasion de prêcher le graffiti : avec l’Office du tourisme, il a eu l’idée de proposer un tour d’horizon des graffs lensois, avec même la possibilité donnée aux visiteurs d’expérimenter eux-mêmes le graff.
Graffeurs du monde
Il y a sept ans, Bertrand Parse a eu l’envie de créer un festival. « Nous nous sommes d’abord intégrés à des événements lensois avant de voler de nos propres ailes », résume-t-il. La septième édition du festival s’est déroulée les 16 et 17 juin dernier avec plus de vingt graffeurs venus de toute l’Europe, et même du monde entier. « Faire venir des artistes graffeurs japonais ou australiens à Lens, c’est une manière de faire rayonner la ville. J’ai aussi envie que les gens découvrent les différents styles, du tag (littéralement signature) au street art en passant par le figuratif, le pochoir comme Jef Aérosol ou le lettrage. » Et bien évidemment… l’inimitable graff sur briques rouges.
En Savoir +
Site du collectif Red Bricks : www.red-bricks.fr/graffitis-dans-le-nord-pas-de-calais/
Site de Bertrand Parse : www.parse1.fr